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Les temps changent. Nul besoin de partir loin et longtemps pour voir son petit univers subir les affres du changement que d’autres d’ailleurs, ne le considèrent nullement torturants et lui préfèrent le terme « d’évolution ». Voilà un monde qui peut propulser en une fraction de seconde un individu au statut juste en dessus ou en dessous du sien sans crier gare ni train ni rien du tout d’ailleurs. Pour celui qui voit sa progression aller vers une hauteur inespérée, il va sans vergogne, foncer la tête baissée, bousculant au passage ses camarades devenus soudainement bien petits, attiré vers ce nouveau pouvoir promis. L’homme est ainsi, Amen. Quant à celui qui se voit tomber de son trône, tant pis, il n’avait qu’à être performant. Voilà donc jadis les meilleurs amis du monde se marchant gaiement sur la tête, se piétinants sans remord avec le sourire du vainqueur, pour une once d’avancement et à peine d’argent en plus à la fin du mois. Fini la compassion et la camaraderie, les perdants sombrent dans la rancœur, les gagnants considèrent que c’est largement mérité et les hautes sphères se félicitent. Vient alors la période de méfiance. Alors qu’avons-nous à perdre finalement. Et bien, un peu plus que l’on ne s’imagine. Dans la plupart des cas, les relations entre humains sont généralement basées sur des individus de plus ou moins le même niveau social. Lorsque l’écart augmente entre ces niveaux, on peut comprendre la distance et le changement d’attitude des uns et des autres, par exemple l’ouvrier qui devient du jour au lendemain un patron influent, se doit de renier les siens, car en ce qui le concerne la « pesée d’intérêt » est clair. Mais lorsque cette différence sociale est restreinte, je veux dire quand elle se passe en bas, tout en bas, et qu’elle ne concerne que l’employé qui va devenir petit chef, petit caporal, petit infirmier-chef, petit je ne sais quoi, c’est là que la perversité du système apparaît. Pas besoin de donner beaucoup pour aiguiser l’appétit d’un « petit » pour qu’il se dépasse en écrasant son origine et sacrifie tout sur l’autel de l’avancement. La loyauté est une notion bien théorique dans nos entreprises. Les hautes sphères et autres intelligentsias dirigeantes l’ont bien compris et ce depuis longtemps. Réorganiser, refondre, revoir, révolutionner, quels que soient les milieux, lorsqu’il faut tout bouleverser, autant prendre des gens qui sont acquis à la cause et écarter ou jeter les autres, sachant que les premiers n’ont pas besoin de beaucoup de cacahuètes pour danser ou jouer leurs nouveaux rôles avec le plus grand sérieux. Humainement que reste-t-il ? Pas grand-chose en fait, les récentes affaires de suicides dans une entreprise de télécommunication française le démontrent bien. Il s’agit là d’exemples extrêmes certes, mais dans l’élan des grands bouleversements de nos sociétés ou de nos administrations, qui se soucie des dégâts collatéraux sur les personnes ou les influences sur leur petite vie. Pas un ne retient de leçon et aucune société de consulting n’est capable de proposer des réformes qui tiennent compte de l’humain et des intérêts de leurs clients simultanément. Alors la seule chose qui peut consoler le perdant, c’est lorsque le gagnant perdra à son tour, car la caractéristique principale du changement c’est qu’il intervient régulièrement et surtout inexorablement.