Micheline c’est notre Présidente à nous les Hélvètes. Conseillère fédérale et venant de la Genève-internationaaaale, elle a été élue tout récement comme Présidente de la Confédération à juste ça, c’est à dire à un cheveu dans la soupe ou presque ! Hormis sa coupe de cheveux rappelant les heures de gloire -heureusement passées- de Mireille Mathieu, elle a plutôt du caractère Micheline et surtout, elle n’aime pas du tout les contradictions, fussent-elles de politiciens ou plus encore celles de son entourage direct. Une main de fer la Micheline. Dommage que ce manque évident d’esprit d’autocritique lui fasse si cruellement défaut, car tout de même, les récents évènements nous démontrent qu’il faudrait parfois un peu plus que la contredire. Car Micheline, question bourdes, c’est un peu notre championne « over categorie’s » à Berne.
L’histoire commence, un soir de juillet 2008, la Justice genevoise ordonnait l’interpellation bêtement musclée d’un couple d »intouchables » Hannibal et Aline Kadhafi; Respectivement fils et belle-fille d’un dictateur à la tête d’un pays producteur de pétrole. Régime pour qui, la plupart des pays occidentaux, rampent à ses pieds, sans parler des Etats africains qui lui « doivent » beaucoup -de valises de cash-, de sa gratitude, qui sert généralement à financer de justes causes, comme par exemple des révoltes, guerrillas et parfois même, s’ils sont la forme, un petit génocide local. Car de l’autre côté de la Méditerranée, il en est ainsi, point de démocratie ou autre utopie progressiste qui voudrait un monde meilleur. Des clans, issus eux-mêmes de tribus, règnent sans partage sur ces régions désertiques mais ô combien riche en matière première. C’est une sorte de moyen-âge moderne pour ces dictateurs, utilisant les armes de leurs anciens bourreaux colonisateurs, à savoir l’asservissement, la confiscation des richesses du pays, l’esclavage, le droit de vie ou de mort, bref tout les réjouissances d’une dictature bien portante. La petite Justice genevoise, sûre de sa doctrine toute occidentale, ne se doutait certainement pas de la crise majeure qu’elle allait déclencher en ordonnant l’arrestation de ces gens-qu’il-ne-faut-pas-embêter-parce-que-c’est-comme-ça.
Mais, à Genèèève, d’où vient Micheline, on cultive des traditions fort différentes à celles de l’Afrique du nord, comme les droits de l’homme, la justice et autres valeurs démocratiques basiques. Tout ceci, dans la même ville qui abrite les fortunes colossales des dictateurs ou autres hommes de pouvoirs, et qui d’ailleurs font certainement partie probablement du même club de golf que le clan Kadhafi. Micheline elle, ne règne pas. Mais confortablement installée à Berne au département fédéral des affaires étrangères, elle ne doute pas. Dans ce département, elle n’a jamais eu vraiment à s’occuper d’autre chose que de défendre les intérêts de l’Hélvètie dans le cadre de questions politiques – et pour cause- comme par exemple les négociations bi-trucs avec la courageuse UE, ou, en bonne hélvète[1], offrant ça et là les services de la Suisse comme médiateur entre deux bélligérants se mettant joyeusement la pâtée par population interposée depuis longtemps, donnant au passage l’image d’une femme d’Etat, oeuvrant pour un meilleur monde. Bref, toute l’illusion proprette d’une diplomatie intelligente au service de notre bon pays.
Mais voilà, notre monde -et les diplomates professionnels le savent bien- est fort différent selon les endroits où l’on se trouve. C’est d’ailleur à se demander si Micheline, ou plutôt si ses services, ont simplement accès à Wikipedia. Si tel avait été le cas, Berne, comprenez, La Suisse, aurait immédiatement compris à qui nous avions à faire lors de la crise libyenne. Notons au passage que la naïveté ne doit pas être une tare réservée au DFAE. La Tribune de Genève (journal à grand tirage, donc très bon pour la cheminée), qui dans une plus que stupide course au scoop, publie les photos « police » (obtenue de manière illégale) de l’interpellé aux cheveux gominés par manque de goût, sous le prétexte affligeant du droit l’information. Cela déclenchera au passage l’enragement du clan Kadhafi. On connait la suite, deux ans de prise d’otages pour deux de nos concitoyens, un cafouillage politique indescriptible sous la coupole et qui va produire des dommages irréversibles à notre gouvernement en terme de crédibilité et accessoirement, de bien faire rire le clan Kadhafi, qui va encaisser au passage une tout petit million et demi de nos francs, versé par Micheline.
Mais voilà que l’histoire -la taquine- met à l’épreuve le clan sanguinaire dans son propre pays. Les voilà tous en danger, par un bête vent de révolte de son propre peuple (si on peut parler ainsi), et propagé par ses voisins directs en quête de liberté. Des troubles impensables même quelques heures auparavant éclatent en Libye. Alors tout le monde se met à rêver. Kadhafi tantôt tyran, tantôt terroriste -ce qu’il a lui-même reconnu-, tantôt meilleur pote de harem de Berlusconi, tantôt campeur de l’Elysée, Kadhafi le furieux pourrait bien se retrouver au bout d’un corde sur la place verte. En quelques jours, l’Est du pays n’est plus sous le contrôle du clan. Des militaires désertent et rejoignent les »insurgés ». Ils se montrent au yeux du monde, veulent la liberté, et peut-être même la démocratie qui va avec, va savoir.
Alors Micheline intervient chez Darius[2] , et parle de « régime criminel », s’insurge contre le clan Kadhafi avec une verve qui fait plaisir à entendre. Fini, le Tribunal arbitral chargé de résoudre le conflit entre les deux pays, suspendu et quasi jeté aux oubliettes en direct live. « Il n’y a plus de partie plaignante » (un peu comme pour le couple Hannibal et Aline). La Suisse veut des sanctions elle n’a n’a jamais eu peur de Kadhafi. Micheline se lâche une peu, a du plaisir, un peu comme chez Morisod et ça se voit.
Sauf que voilà, donné pour perdant par notre Ministre visionnaire devant un Darius bouche bée, le Tyran et son clan a retourné la situation en sa faveur. Une opposition désorganisée, peu armée, n’a pas réussi la révolution tant espérée. A l’heure où j’écrit ces lignes, la garde rapprochée de Kadhafi est probablement entrain de liquider les « insurgés » et les rivières de sang promisent par le fiston Kadhafi sont en bonne voie de remplissage. La pensée du jour à Benghazi doit être; Ah, il va falloir penser à se barrer là !
Face à cette nouvelle donne, l’Europe se couche et nous donne la nausée, en commençant par l’Allemagne et la silencieuse et embarrasée Italie. Les USA ne veulent pas s’engager -à juste titre d’ailleurs mais pour d’autres raisons- et la ligue arabe tousse, incapable de quoi que ce soit. C’est un monde de burnes-molles, qui se désintéresse du problème, apeuré simultanément par une catastrophe nuclaire au Japon, qui fait autrement trembler le monde. Tant pis pour les Libyens, visiblement le monde s’en fout, sauf le discret Ban Ki-Monn, qui demande un « cessez le feu ». Oui je sais, c’est des déconneurs à l’ONU. Allez et si on votait une résolution, histoire que l’histoire ne nous en tienne pas trop rigueur.
Reste Micheline, qui a dit des bêtises chez Darius et qui a vendu la peau du dictateur avant qu’il ne soit tué, et il y a fort à parier que Mouammar soit très fâché. Ca va encore être notre fête ! Espérons deux choses: Premièrement que le tyran ne reçoive pas la TSR, et deuxièment qu’il chute tout de même, par une petite trahison entre amis par exemple, histoire de nous éviter de nouveaux déboires avec les verts, j’veux dire les libyens, pas Ueli Leuenbeger. Si notre dictateur décide à nouveau de nous ébouriffer Micheline, on peut craindre le pire, car car comme elle nous a fait une belle démonstration, notre Micheline nationale et ses services ne savent pas trop comment faire, quand ça chauffe un peu fort.
Une fois les opposants du régime de Kadhafi vaporisés au lance-missiles d’origine russe, Jean Ziegler pourra retourner boire le thé en Libye, avec ses amis. Il paraît qu’on aura un bel été à Tripoli.